Une notoriété mondiale
C’est en tant qu’officier de liaison britannique durant la Grande révolte arabe de 1916 à 1918 que T. E. Lawrence accède à la célébrité. Son action pendant ces années est connue grâce aux reportages du journaliste américain Lowell Thomas et aussi à son autobiographie Les Sept Piliers de la sagesse. Sa vie aventureuse, extraordinaire, sa carrière militaire, et le talent littéraire dont il fait preuve pour les décrire, assurent sa postérité en Occident comme dans le monde arabe.
Les débuts
Lawrence étudie au Jesus College à Oxford et se passionne pour l’histoire. En 1909, il voyage au Liban et en Syrie pour étudier les châteaux bâtis par les Croisés. Il parcourt plus de 1 000 miles à pied en trois mois. Lawrence occupe ensuite un poste d’archéologue au Moyen-Orient. En décembre 1910, il part pour Beyrouth, puis Jbail (Byblos), où il apprend l’arabe auprès des enseignantes de l’American Mission School. Il participe aux fouilles de Karkemish près de Jerablus, au sud de l’actuelle Turquie. À la fin de l’été 1911, il retourne au Royaume-Uni pour un bref séjour et revient dès novembre au Moyen-Orient afin de travailler brièvement avec Williams Flinders Petrie à Kafr Ammar en Égypte. Il retourne à Karkemish travailler et continue de visiter régulièrement le Moyen-Orient afin d’y mener des fouilles jusqu’au début de la Première Guerre mondiale. Ses nombreux voyages en Syrie, sa vie partagée avec les Arabes, à porter leurs vêtements, apprendre leur culture, les rudiments de leur langue et de leurs dialectes, sont des atouts précieux durant le conflit. En janvier 1914, sous couvert d’activités archéologiques, Lawrence est envoyé par l’armée britannique en mission de renseignements dans la péninsule du Sinaï. De mars à mai, Lawrence retourne travailler à Karkemish. Après l’ouverture des hostilités en août 1914, Lawrence décide d’attendre octobre avant de s’engager.
La Révolte arabe
Il est alors nommé au Caire, où il travaille pour les services de renseignements militaires britanniques ent tant qu’agent de liaison entre les Britanniques et les forces arabes. En juin 1916, il est envoyé dans le désert afin de rendre compte de l’activité des mouvements nationalistes arabes. Durant la guerre, il combat avec les troupes arabes sous le commandement de Fayçal ibn Hussein qui mène une guérilla contre les troupes de l’Empire ottoman. La contribution principale de Lawrence à l’effort britannique consiste à convaincre les Arabes de coordonner leurs efforts afin d’aider les intérêts britanniques. Il persuade notamment les Arabes de consolider leurs positions sur les côtes du Hedjaz, à Rabigh et Yenbo, et de ne pas chasser tout de suite les Ottomans de Médine, forçant ainsi les Turcs à conserver de nombreuses troupes pour protéger la ville. En 1917, après la prise d’El Ouedj, la route du nord s’ouvre à Fayçal et à ses hommes. Lawrence organise une action commune entre les troupes arabes et les forces de Auda Abu Tayi, chef des Howeitat, jusqu’alors au service des Ottomans, contre le port stratégique d’Aqaba, et ce sans prendre l’avis de l’État-major anglais du Caire qui a déjà organisé une opération amphibie pour tenter de s’emparer de la place mais qui ne peut espérer la conserver si l’on ne prend pas en même temps le contrôle de la voie menant d’Aqaba à Maan où se trouve une importante garnison ottomane. Lawrence n’accepte pas de suivre la logique de Fayçal, qui préfère une opération combinée terre-mer alors que l’idée de Lawrence est de venir par l’intérieur des terres uniquement, ce qui créé une surprise totale. Le 6 juillet 1917, Aqaba tombe aux mains des Arabes. En novembre, Lawrence échoue dans sa tentative de faire sauter à la dynamite l’important viaduc de Tell el-Shehab, sur le Yarmouk, affluent du Jourdain. En 1917, TE Lawrence est arrêté par les Turcs à Deraa alors qu’il mène une mission de reconnaissance déguisé en Arabe, il est torturé mais parvient à s’échapper. Un an plus tard, le 1er octobre 1918, Lawrence participe à la prise de Damas, libérée par des troupes anglo-australiennes, après avoir aidé à remporter l’une des seules batailles rangées livrées par les Bédouins à Tafilah.
Comme un arabe
Lawrence porte le costume arabe, monte à chameau, adopte des coutumes locales et devient un proche du prince Fayçal. Vers la fin de la guerre, il cherche sans succès à convaincre ses supérieurs de l’intérêt de l’indépendance de la Syrie pour le Royaume-Uni. En juillet 1920, la colonne française du général Mariano Goybet, précédant le général Henri Joseph Eugène Gouraud, bat les troupes chérifiennes à Meissaloun et chasse Fayçal de Damas, brisant l’espoir de Lawrence de libérer durablement la Syrie.
L’après-guerre
Lawrence travaille pour le Foreign Office et assiste à la conférence de paix de Paris entre janvier et mai 1919 en tant que membre de la délégation de Fayçal. Il est ensuite conseiller de Winston Churchill au Colonial Office jusque vers la fin de 1921. En 1922, il met fin à sa carrière de conseiller politique pour les affaires proche-orientales et contracte un engagement comme simple soldat dans la Royal Air Force. Sous le pseudonyme de « Shaw », il s’engage en 1923 dans le Royal Tank Regiment. Il veut rejoindre la RAF et cela lui est accordé en août 1925. À la fin de l’année 1926, il est assigné à une base en Inde où, envoyé en mission secrète, il surveille les partisans de l’ancien califat ottoman. À la même époque, un certain « Pir Karam Shah », un saint homme, fait son apparition dans la zone pachtoune de la frontière et prêche contre le roi Amanullah Khan d’Afghanistan. Bien des témoins accusent ce dernier d’être Lawrence déguisé en Afghan, et l’information fait la une des journaux européens, américains, et, bolchéviks. Face à l’importance de ce scandale naissant, les Britanniques prétendent que ces rumeurs sont infondées et rapatrient Lawrence en 1929. Il travaille ensuite à la mise au point de canots à grande vitesse pour le sauvetage des pilotes d’hydravion tombés en mer. Il quitte à regret l’armée à la fin de son contrat en mars 1935. Quelques semaines plus tard, il meurt des suites d’un accident de moto à deux pas de son cottage de Clouds Hill dans le Dorset, à l’âge de 46 ans. Au-delà du mythe, Lawrence d’Arabie reste l’un des officiers les plus influents dans le développement d’une doctrine insurrectionnelle au xxe siècle.